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Les hallucinogènes sont des psychotropes très intéressants. Ils modifient ce
que le cerveau voit, entend, sent, sa perception de la taille des choses, du
temps... Par exemple : notre cerveau dispose d'un ensemble de neurones dont
la fonction est de se rendre compte et de gérer le fait qu'un objet
s'allonge. Si, en temps normal, on regarde un objet inanimé comme une
brique, ces neurones ne seront pas stimulés. La conscience percevra que
cette brique ne s'allonge pas. Par contre si on regarde un élastique sur
lequel quelqu'un tire, ces neurones seront stimulés. Ils transmettront le
message "L'objet est en train de s'allonger !" La conscience percevra donc
que l'élastique est en train de s'allonger. Mais si on prend du LSD, ces
neurones vont être mis en fonctionnement intempestivement. Ils
fonctionneront, même si on est en train de regarder la brique. On aura donc
l'impression que la brique est en train de s'allonger ! Tout le système de
perception va être "détraqué", que ce soit pour la perception visuelle,
auditive, le temps, le fait de se rendre compte qu'il y a des choses
derrière ce que nous observons, la remontée de souvenirs... Un bon
hallucinogène fait même voir et vivre des choses "sur base de rien",
simplement parce que le cerveau est techniquement capable de se rendre
compte que ces choses arrivent. On peut avoir l'impression de voler, de
tomber, de nager... Si tous les centres de perception sont détraqués en même
temps, on peut par exemple avoir l'impression de nager dans de l'air qui est
en train de s'étirer. Il peut aussi y avoir une confusion entre les sens :
on peut entendre des couleurs et voir des sons
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Un champignon de la famille des amanites contient un psychotrope qui met
le cerveau en situation de combat. En cas de menace grave le cerveau peut
se mettre dans un mode accéléré : les réflexes seront beaucoup plus
rapides, la conscience se focalisera sur toutes les menaces qui entourent
la personne. On voit le monde autour de soi bouger très lentement, on
devient beaucoup plus rapide. Les soldats de métier connaissent bien cet
état. Ils savent s'y préparer avant chaque bataille. Ce psychotrope
extrait du champignon semble à priori très intéressant. Les Gaulois l'ont
utilisé. L'armée américaine a fait des recherches pour essayer de
l'utiliser pour déclencher le mode de combat chez les soldats. Mais ils
ont abandonné l'idée. Ils ont fait quelques essais, dont la conclusion a
été la suivante : ce n'est pas une bonne idée d'en donner aux soldats
inexpérimentés, parce qu'ils risquent de se mettre à faire n'importe quoi.
Ils ne sont pas à la hauteur. Quant aux professionnels, ils n'en ont pas
besoin. Ils trouvent même que ce produit les dérange, que cela diminue
leurs performances.
La caféine, les amphétamines, la cocaïne... sont des psychotropes qui
stimulent l'activité du cerveau. Ils rendent actif, font en sorte que l'on
perçoit mieux ce qui se passe.
(L'héroïne et la cocaïne sont des psychotropes qui de prime abord ont une
action opposée : l'héroïne calme alors que la cocaïne excite. Mais ils ont
en commun une caractéristique essentielle : ils agissent sur les centres
de l'approbation. Ils engendrent des sensations de plaisir et un sentiment
de bien-être. Du fait de leur importance de cette caractéristique, un
chapitre entier leur est consacré plus loin dans ce texte.)
Les neuroleptiques font tout simplement cesser l'activité du cerveau. Une
personne qui a pris une forte dose de neuroleptique ne peut plus poser
aucun acte, ne peut plus réfléchir, ne sait plus qui elle est.
La kétamine fait cesser l'activité des neurones qui amènent au cerveau les
informations de l'extérieur. On ne voit plus rien, on n'entend plus rien,
on ne sent plus rien, mais on reste éveillé. Alors le cerveau se met à
générer lui-même des images, des sons, des sensations. On peut "voir"
n'importe quoi : des personnes qu'on a connues, des paysages, Dieu...
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Certains produits mettent très longtemps à
être éliminés. Leur effet peut durer des années ! En restant bloquées dans
le cerveau, les molécules d'opiacés causent l'effet inverse de leur effet
initial : le consommateur ressentira des douleurs physiques et morales. Un
traitement médical peut permettre de forcer le cerveau à éliminer les
molécules d'opiacé "bloquées" dans le cerveau.
Parfois l'effet ne cessera jamais, tout simplement parce que le produit a
détruit des choses dans le cerveau. C'est par exemple le cas des molécules
d'héroïne artificielle produite par des étudiants en chimie : les
destructions qu'elles ont occasionnées dans le cerveau leur ont donné une
maladie de parkinson dont ils ne pourront pas guérir.
Beaucoup de psychotropes déforment la personnalité si on les prend
régulièrement pendant de longues périodes. Probablement surtout si les
effets continuent pendant qu'on est en train de dormir. Le cerveau a sa
perception du monde faussée par les effets du produit. Il va donc
"s'adapter", se changer au fil du temps, dans un sens qui répond aux
perceptions que lui donnent les effets du psychotropes. A cause de cela
certaines personnes deviennent asociales, paranoïaques, prostrées... S'ils
arrêtent de prendre du produit il leur faudra plusieurs années pour que le
cerveau se "recâble" d'une façon plus naturelle. Un cas très intéressant
est celui de beaucoup d'héroïnomanes. Ce sont des mythomanes achevés. Au
fil du temps ils se persuadent de ce qu'ils veulent croire à un point
extrême. Ils sont réellement convaincus de ce qu'ils vous disent.
L'héroïne a permis une modification à la racine de leurs souvenirs.
L'héroïne n'attaque pas directement les neurones qui gardent les
souvenirs. Mais l'héroïnomane vit dans les rêves délirants que lui procure
l'héroïne et son cerveau finit par enregistrer ces rêves comme étant la
réalité. Le jugement des centres du souvenir est faussé par l'héroïne.
Un cas pernicieux est par exemple celui du LSD, qui peut se stocker
dans les graisses de l'organisme. Un jour, sans qu'on s'y attende, les
cellules de graisse libèrent le LSD qu'elles avaient stocké... C'est une
loterie : cela peut arriver ou ne pas arriver. C'est pour cette raison que
l'administration américaine part du principe qu'un homme qui a consommé
plusieurs fois du LSD doit être considérée comme fou. A tout moment du LSD
peut se libérer dans son organisme et lui faire faire n'importe quoi.
Toute personne se destinant à une carrière importante doit éviter le LSD,
parce qu'il est parfois possible de détecter la prise de LSD plusieurs
années après. (Ceci est également vrai pour l'héroïne.)
Certains antidouleurs vont bloquer les signaux de douleurs avant qu'ils
n'atteignent le cerveau. D'autres ne vont pas bloquer la douleur, mais
vont empêcher le cerveau de s'en rendre compte...
Les benzodiazépines sont des somnifères qui agissent d'une façon tout à
fait différente des opiacés. Ils ont été largement adoptés parce qu'ils
n'avaient pas les effets secondaires des opiacés.
La plupart des produits cumulent plusieurs effets psychotropes
différents :
La morphine est un antidouleur, un anxiolytique, un somnifère et un
stimulant des centres du plaisir.
Les THC, contenus dans le cannabis, sont hallucinogènes et anxiolytiques.
La cocaïne est un puissant insensibilisant et un vasoconstricteur quand
elle touche une partie du corps. Mais elle est un stimulant, un
anxiolytique et un stimulant des centres du bien-être quand elle touche le
cerveau.
Certains psychotropes ont des effets secondaires comme le manque. Après
l'effet du produit, le cerveau va ressentir l'effet contraire.
C'est le contrecoup. Par exemple, un peu après que l'effet de certains
anxiolytiques se soit estompé, la personne va ressentir de fortes
angoisses. C'est pour cette raison que l'on donne instruction aux
personnes qui prennent ces produits de les prendre en continu et d'arrêter
graduellement. L'héroïne procure un plaisir et un bien-être intense. Quand
l'effet cesse, l'héroïnomane ressent de très fortes douleurs et vit des
angoisses abominables. Cet enfer peut être tellement horrible que certains
en meurent. Pour éviter de vivre cela l'héroïnomane est obligé d'en
reprendre dès que les effets de la prise précédente commencent à
s'estomper. S'il ne prend pas de nouvelle dose, il lui faudra plusieurs
jours pour revenir à un état normal. Pendant tout ce temps il souffrira
énormément. C'est ce qu'on appelle "le manque physique". Beaucoup de
toxicomanes endurcis ne ressentent plus aucun plaisir quand ils prennent
de la drogue, ils la consomment uniquement pour éviter le manque, pour ne
pas crever de douleur et d'angoisse.
Le café et la cocaïne stimulent l'activité du cerveau. Ils le poussent à
fond, lui font utiliser toutes ses réserves de molécules
neurotransmetteurs. Après un certain temps, ou quand l'effet du produit
cesse, le cerveau ne dispose plus de neurotransmetteurs. Alors l'activité
cérébrale de la personne s'effondre, comme si elle avait pris un
neuroleptique. Beaucoup d'étudiants en ont fait les frais : ils boivent un
paquet de café sur la nuit afin de finir d'étudier un gros examen. Ils
connaissent bien leur matière. Mais ils arrivent devant le professeur au
moment où l'effet du café cesse. Ils sont comme hébétés, ne savent pas
quoi répondre aux questions du professeur. Ce n'est que quelques heures
plus tard, quand le cerveau a reconstitué ses réserves de
neurotransmetteur et reprend son activité normale, que l'étudiant se met à
pouvoir répondre de façon limpide et précise aux questions qui lui avaient
été posées... mais c'est trop tard. Ce phénomène explique aussi pourquoi
les consommateurs de cocaïne passent pour être de grands paranos : quand
l'effet s'estompe, le bien-être fait place à son contraire : des
angoisses, des peurs, un sentiment d'insécurité, un délire de persécution.
En même temps, le cerveau est dans un état de non fonctionnement,
incapable de mettre une idée devant l'autre, de se raisonner. La réaction
normale d'un humain quand il se sent menacé et qu'il n'arrive pas à gérer
la situation, c'est la colère. Il se fâche, il explose, il attaque.
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Les conséquences de la prise inconsidérée de psychotropes sont nombreuses et
très variées :
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Des personnes en bonne santé font une crise
cardiaque parce qu'elles font des efforts en ayant pris de la cocaïne. Ce
pour plusieurs raisons, qui se cumulent :
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Comme elles se sentent très bien, elles
ne ressentent pas la fatigue qui leur signale qu'il est temps d'arrêter. |
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La cocaïne est un excitant. Elle pousse à
se dépenser, à courir plus vite et plus loin. Donc à faire travailler le
coeur plus fort. |
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La cocaïne est un vasoconstricteur. Elle
fait se resserrer les vaisseaux sanguins. Le coeur doit donc pomper plus
fort pour faire circuler le sang. |
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La cocaïne masque la soif. La personne
peut donc travailler ou faire du sport longtemps sans se rendre compte
qu'elle devrait boire. La déshydratation rend le sang plus épais, plus
difficile à faire circuler. Le coeur doit pour cela aussi pomper plus
fort pour compenser. |
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L'alcool est à l'origine d'un très grand
nombre d'accidents de la route. Beaucoup de psychotropes peuvent entraîner
des accidents ménagers. Même la cigarette, mais pas à cause de ses
effets : si on n'est pas très prudent elle peut causer des incendies. |
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Les consommateurs d'extasy se retrouvent au
bout de quelques temps avec des reins détruits et une colonne vertébrale
fragilisée. |
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Des personnes sont brûlées au troisième
degré parce qu'elles ont pris de la morphine ou de l'héroïne. Ce sont de
puissants antidouleurs qui peuvent même empêcher de sentir qu'une flamme
vous lèche le corps. |
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Quelqu'un qui se nourrit bien et qui
consomme des quantités raisonnables d'héroïne de bonne qualité n'aura
aucun dégât physique, même après quelques années. Les graves problèmes
liés à la consommation d'héroïne sont des effets pervers. A cause du
produit certaines personnes se négligent : elles mangent mal, ne vont pas
chez le dentiste... au bout d'un an ou deux elles sont maigres, leur peau
est comme du parchemin, elles ont déjà perdu quelques dents. Certains
dealers coupent leur héroïne avec des produits comme de la strychnine ou
de la mort-aux-rats. Les effets de l'héroïne sur le mental de gros
consommateurs est dévastateur : ils deviennent des prédateurs à la
recherche de leur dose, totalement coupés des autres êtres humains. |
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L'héroïne, la cocaïne et le LSD peuvent
être pris par piqûre. En se prêtant leurs seringues entre eux, beaucoup de
toxicomanes ont attrapé des maladies graves comme le SIDA et l'hépatite B.
Certains groupes de toxicomanes considèrent carrément que se passer la
même seringue de l'un à l'autre fait partie du rite. Cela augmente leur
plaisir en créant un sentiment d'identité de groupe. Dans le cas de
l'héroïne, comme l'accro est virulent, un toxicomane peut utiliser une
seringue même s'il sait qu'elle a été utilisée par une personne
contaminée. |
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Le LSD, la cocaïne et l'alcool, surtout à
fortes doses, causent la destruction de cellules du cerveau. Quand on
découpe le cerveau d'une personne morte d'une cirrhose du foie due à
l'alcool, on découvre que de grandes parties de son cerveau sont devenues
des plaques de matière inerte. Dans le cas de fortes doses de LSD les
lésions sont moins évidentes à observer physiquement. Mais les personnes
qui ont fait cela disent "avoir perdu quelque chose". |
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Le crack est une drogue très destructrice.
Comme elle se prend par inhalation on a cru un moment qu'au moins elle
n'augmenterait pas la propagation du SIDA. On a déchanté : les personnes
sous l'effet du crack ont un comportement sexuel démentiel. Ils "sautent
sur tout ce qui bouge", sans prendre la moindre précaution. |
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Le tabac est la source de psychotrope qui a
les conséquences les plus nombreuses sur la population. 5% des personnes
ont une insuffisance respiratoire pénible à cause du tabac. Les maladies
graves liées à la consommation de tabac sont nombreuses : cancer, gangrène
des jambes, emphysème... Les conséquences sont importantes aussi pour les
personnes qui ne fument pas mais vivent avec des fumeurs. Ils auront les
mêmes problèmes que les fumeurs. |
Quelques
chiffres :
La consommation de drogues
illicites :
Au niveau national, chez les 12-75 ans, la
drogue illicite la plus consommée est le cannabis, avec un français sur cinq
(21.1%) qui l'a déjà expérimenté. L'usage au moins occasionnel de ce produit
concerne 7.6% des individus, l'usage au moins répété 4.3% et l'usage
régulier environ 1.5% [1].
Pour les produits licites, le niveau
d'expérimentation est nettement supérieur : environ 95 % pour l'alcool et
plus des trois quarts pour le tabac (dans la tranche d'âge 12-75 ans).
Les hommes sont
deux à trois fois plus nombreux que les femmes à avoir consommé au moins une
drogue illicite au cours de leur vie, à l'exception des amphétamines pour
lesquelles la différence entre les sexes n'est pas significative.
Quelques
questions :
Drogues dures et douces, quelles différences ?
Aucune. Il n'y a pas de drogue douce ; drogue et douce sont incompatibles.
Il faut prendre garde au poids des mots. Le mot " doux " évoque la médecine
douce, sans risque. Toutes les drogues sans exception sont dangereuses. Dire
qu'une drogue est douce incite à la consommation. C'est le but recherché par
les dealers et les trafiquants, pour vendre, tous les moyens sont bons.
Quelles sont les tranches
d'âge les plus touchées ?
La moyenne d'âge des toxicomanes suivis dans les centres est d'environ 26
ans. On peut devenir héroïnomane à 17 ans. Mais toujours après plusieurs
années de cannabis, shit et haschisch. La consommation de cannabis peut
débuter vers 10 ou 11 ans, le plus souvent 13 ans. Les adolescents sont de
bons clients potentiels pour des vendeurs de cannabis. Environ 2/3 de
garçons pour 1/3 de filles.
Quelles sont les condamnations pour des dealers ?
Cela dépend de l'importance du trafic. Cela peut aller, pour un important
trafic, jusqu'à vingt ou trente ans de prison et cinquante millions de
francs d'amende. Un petit dealer peut avoir plusieurs mois de prison et
cinquante mille francs d'amende.

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